Le Monde de Verlaine vous présente l'avant dernier chapitre d'Une vie de chat, la nouvelle écrite par Océane. Si vous avez manqué le début de ce récit plein de tendresse, cliquez ici.
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| Auguste Renoir, La fille au chat (source : reproduction-grands-peintres.com) | 
CHAPITRE 3
Les intrus
Cela faisait maintenant cinq semaines que la famille s'était agrandie. Un
    matin, Lucy se réveilla en entendant sa mère parler au téléphone mais ne
    reconnut pas à qui sa mère pouvait bien s'adresser. Elle enfila donc à la
    va vite une large polaire et sortit de sa chambre. La jeune fille descendit sur la pointe des pieds les escaliers et tendit l'oreille. Pourtant, elle savait parfaitement qu'elle n'avait pas le droit d'espionner les conversations de ses parents, mais la
    curiosité finit par l'emporter. Elle, qui d'habitude se rebellait à chaque
    instant, ne défiait pas l'autorité de ses parents pour les conversations
    auxquelles elle n'avait pas accès. C'était comme un pacte qu'ils avaient
    conclu : on ne participait qu'aux conversations auxquelles on était
    convié, que celles-ci soient téléphoniques ou de vive voix.
Lucy entendait uniquement que les paroles de sa mère :
- Oui, ils ont maintenant deux mois et leurs sens sont déjà très
    développés. Ils sont adorables et attentifs. Ces chatons sont très
    attachants, je suis sûre que l'un d'eux vous plaira. 
- ... 
- Cet après-midi, bien sûr ! 
- ... 
- Avez-vous déjà vu la photo ?
- ... 
- D'accord, très bien, lequel souhaitez-vous ?
- ...
- Alors c'est noté, venez donc vers quatorze heures, cela vous va ? 
- ... 
- À cet après-midi alors !
Lucy comprit alors que ses parents souhaitaient donner les chatons. Elle
    était complètement abattue. Pourquoi ne pas garder les petits chats ? Et puis qui
    étaient ces intrus ? Étaient-ils gentils ? Ou était-ce d'horribles personnes
    ? Les questions se bousculaient dans la tête de la jeune fille. Elle pensa :
" Mais, attends une seconde... Si je me montre désagréable, peut-être qu'ils
    s'en iront et qu'on pourra garder les chatons... "
Lucy stoppa ses réflexions, et tout de suite elle ressentit un grand vide
    dans son cœur, suivi d'une immense douleur qui lui comprimait la poitrine et lui
    coupait le souffle.
Elle était tellement révoltée par cette horrible nouvelle qu'elle
    laissa ses émotions, mélange de haine et de colère, la submerger. Elle qui
    arrivait toujours à contenir ses émotions ne put s'empêcher de haïr ses
    parents du fond du cœur. Dans ces moments là, elle pouvait se montrer d’une extrême méchanceté. 
La jeune fille déboula comme une furie dans le salon, là où avait eu lieu
    l'appel téléphonique quelque minutes plus tôt, et se mit en travers du
    chemin de Gwendoline, qui venait de raccrocher. Sa mère se trouvait près du
    sofa mais il n'y avait qu'une seule issue, et sa fille en barrait l'accès.
Gwendoline s'étonna de voir sa fille arriver comme cela dans la pièce :
- Maman ! Mais qu'est ce que cela veut dire ? ! Comment osez-vous vouloir vous débarrasser des chatons ainsi ? ! Leur place est avec leur mère ! Vous devriez avoir honte, hurla la jeune fille avec mépris.
- Mais Lucy d'où sors-tu comme ça ? demanda sa mère.
- Ne change pas de sujet, maman ! Pourquoi as-tu appelé quelqu'un pour lui
    donner un chaton ? ! Hein ! Pourquoi ?
- Déjà, tu vas commencer par te calmer car moi je ne parle pas à une furie,
    OK ? On n'est pas dans une maison de fous, ici ! ordonna Gwendoline qui
    commençait à être à fleur de peau.J'ai appelé ce monsieur pour lui donner
    Crevette car on ne peut pas, même si on aimerait ton père et moi, garder
    tous les chatons, c'est impossible, et tu le sais.
- Mais leur place est avec leur mère, continua Lucy, vous n'avez pas le
    droit de les séparer de leur maman !
- Ma chérie, écoute un peu ta mère, fais preuve d'un peu de bon sens,
    voyons, lui suggéra doucement David qui venait d'arriver, alerté par les
    éclats de voix.
- Papa, alors tu es de son côté ?
- Je ne suis du côté de personne, voyons ! Il faut juste que tu comprennes
    que nous n'avons pas les moyens de garder une famille entière de chats ! Cela nous coûterait bien trop cher. Tu as pensé au vétérinaire, aux croquettes,
    aux soins et j'en passe !
- Non, j'avais oublié ce détail, c'est vrai, reconnut la jeune fille. Malgré
    tout, elle était toujours furieuse.
- Ce n'est peut être qu'un détail pour toi, mais, crois-moi, ce n'est pas si
    simple... Bon maintenant que cela est réglé n'en parlons plus, mais je te
    préviens, Lucy : ne refais plus jamais, tu m'entends, plus jamais un coup
    pareil ! Entrer en furie dans la maison et hurler à qui veut bien
    t'entendre ! On t'entend de dehors, que vont penser les voisins ? Ils vont
    se poser des questions, c'est sûr ! Alors maintenant on arrête les bêtises,
    c'est clair ?
- Oui, très clair.
- Excuse-toi donc auprès de ta mère, ajouta David.
- Je suis désolée, maman. Je ne le referai plus, je te le promets, se fit
    pardonner Lucy.
- Bien, maintenant passons à table avant que la ratatouille ne refroidisse,
    conclut Gwendoline. 
Lucy n'aimait pas beaucoup cela, mais ne se plaignit pas quand son père lui
    présenta son assiette bien remplie de ratatouille. Personne ne pipa mot pendant
    le repas et le déjeuner se déroula en silence. La jeune fille repassait en vue
    les différents éléments depuis la mise bas de Daisy. L’arrivée des
    chatons, l’achat des produits nécessaires, l’organisation des tâches et maintenant le départ
    de Crevette… La jeune fille repensait à tous ces moments de bonheur absolu
    et aux crises de fou rire qui avaient parfois secoué Lucy et ses parents
    lorsque les chatons faisaient les imbéciles… Bref, les jeunes chats étaient une
    aventure inoubliable mais aussi ils étaient aussi bien encombrants...
Qu’est qui avait poussé ses parents à donner la jeune chatte ? Avait-elle
    fait quelque chose de mal ? Ou simplement ses parents n’aimaient pas les
    chatons et pensaient qu’ils prenaient trop de place dans la maison ?
Lucy regarda l’heure qu’indiquait la pendule se trouvant au dessus du
    buffet, les yeux voilés de tristesse. Un soupir théâtral se fit entendre. C’était
    la jeune fille.
Il était treize heures cinquante-deux. L’heure tant redoutée arrivait plus
    rapidement que prévu. 
(À suivre...) 

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