EDITORIAL


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ÉDITORIAL

Le Monde de Verlaine a deux objectifs : permettre aux élèves de s'exprimer sur l'actualité (au sens très large) et les éduquer aux médias.

Ainsi, tous les vendredis, en salle 5, de 13h à 13h50, sous la direction de M. Aupée, les élèves volontaires pourront venir écrire sur un sujet d'actualité de leur choix (international, national, régional, Évrecy, collège). Ils pourront aussi écrire un article "coup de cœur" ou participer à la Web-TV, La Télé de Paul.

En outre, les enseignants du collège et des écoles du secteur pourront également proposer à la publication des travaux d'élèves réalisés en classe afin de les mettre en valeur.

mardi 7 janvier 2020

"Un décès bien spécial", une nouvelle policière d'Océane Marie

Bonjour, je vous propose ici une nouvelle appartenant au genre policier intitulée « Un décès bien spécial ». Je vous remercie par avance pour votre lecture et votre patience. J’ai adoré écrire cette histoire qui, j’espère de tout cœur, vous plaira. J’ai, jour après jour, ajouté de nouveaux détails, réagencé des phrases pour pouvoir vous apporter un réel plaisir à la lecture de celle-ci. Je l’ai fait d’une première part pour moi mais aussi, comme vous vous en doutez, pour ce concours auquel j’avais déjà participé dans le cadre du festival du roman policier Bloody Fleury, l’année dernière. Je préfère vous prévenir, vous trouverez du langage courant voire familier à certains moments : j’espère que cela ne vous gênera pas. C’est donc avec une immense fierté et un bonheur surdimensionné que je vous propose de plonger au cœur d’un récit « bien spécial »… Bonne matinée, journée, soirée ? Cela dépendra de l’heure à laquelle vous lirez cette histoire. Quoi qu’il en soit, encore merci et bonne lecture ! 
 
Remerciements tout particuliers dédiés au jury qui sera, ici, mon/ma lecteur/lectrice, mais aussi à mes grands-parents qui m’ont accompagnée moralement dans la rédaction de cette nouvelle, et ma famille qui fut à mes côtés du début à la fin, de la première majuscule au point final. 
 
Bien à vous. 
Océane 
 
source : historia.fr

Un décès bien spécial
 
Saluuuut ! La forme, la pêche, la banane ?! Perso, ça fait deux heures que je suis levée, il n’est que huit heures trente, et je pète la forme ! Et vous, ça roule ? Oh, allez, on se bouge ! Nan ?! Bon, ok. Compris. En attendant que ma dormeuse de colloc’ se réveille, je vais me présenter.

Alors, je m’appelle Line, avec un seul n, DAUSSE. Et ouais, pas courant comme nom de famille, hein ? Je viens de prendre dix-sept ans le dix août. Ça fait donc, euh… je suis une véritable burne en calcul mental, trente jours. On est le 9 septembre, précisément. Je suis blonde, les cheveux longs jusqu’aux épaules et ondulés, j’ai de grands yeux verts comme seulement deux pour cents de la population mais aussi comme mon père. De petites tâches de rousseur colorent mes joues et ma peau est légèrement bronzée. Je fais près d’un mètre soixante-quinze et je suis plutôt fine. Je ne fais ni sport ni régimes, c’est simplement génétique. Pff... et mes potes qui me demandent comment je fais, mdr en fait, j’y suis pour rien les coupines. Ouais, ouais, vous avez bien lu, les cOUpines. Depuis quelques mois, je vis dans un appartement près de Caen que je partage avec ma meilleure amie : Alicia. 

Elle est l’opposée de moi. Petite et rondouillette, elle ne dépasse pas le mètre soixante. Elle est métis avec de longs cheveux noirs lui descendant jusqu’aux fesses. Ils sont magnifiquement bouclés et elle possède de splendides yeux noirs. La couleur en est si belle que j’ai l’impression de plonger dedans lorsque l’on se regarde ! 

Maintenant, il est huit heures quarante-cinq. La famille. Alors. Mon père part souvent travailler à Londres mais je n’ai pas la moindre idée de ce dans quoi il bosse. Ma mère, elle, est secrétaire dans les assurances à Mondeville. Mes parents ne sont pas séparés mais je doute que mon père n’ait pas fait la rencontre d’une charmante jeune femme, là-bas et qu’il ne trompe pas ma mère avec elle. Je le connais, je sais comment il est. À vrai dire, mon père du nom de Mark, a toujours voleté d’amourettes en amourettes jusqu’à ce qu’il rencontre ma maman et qu’il ait trois enfants avec elle. J’ai, tout d’abord, un petit frère, Matthéo, et une petite sœur, la dernière de la fratrie, qui s’appelle Camilia. Oui, oui, vous ne rêvez pas, Camil-i-a. Je suis donc l’aînée, talonnée par Mat’, son diminutif, qui a dix ans et la dernière de six ans. La petite intello de service, près de cent questions par jour de sa part. Mon dieu ! Ah ! La sonnerie de téléphone ! 

Je me jette, littéralement, sur mon lit et choppe le portable qui vibre comme un taré.
- Allô ? fais-je.
- Bah alors, ma diva ? déclare une voix chantante que je connais bien, déjà, debout ?
- Tu me connais, je réponds.
À présent je chuchote, il y a quand même Alicia à côté.
La personne éclate de rire alors que retentit le ronflement de ma meilleure amie. Je pouffe et décide d’aller dans ma euh, notre cuisine. Je m’assieds sur le tabouret.
- T’es assise ? demande-t-on.
- Euh, bah ouais. Pourquoi ?
- Une mauvaise nouvelle.
Je me renfrogne et me cale contre le tout petit riquiqui dossier. Oui, pitit, riquiqui.
- Oh, oh… je fais simplement.
- C’est Tamsin, elle est… disons… 

Une sueur froide me dégouline dans le dos. Je n’aime pas quand Tom me dit ça. Ah, oui, au fait. Tom c’est mon petit copain, ça fait genre… Six mois qu’on sort ensemble ? Ah, non, c’est vrai, neuf. Tamsin, c’est une pote d’enfance à lui, moi qui d’ordinaire suis jalouse, quand il s’agit de Tasmin je n’ai rien à craindre. Il n’y a jamais rien eu et n’y aura jamais rien entre eux. Oh là, du calme les poulettes, je vous connais, je ne dis pas que Tam n’a pas de charme, loin de là. Elle est une vraie déesse. Genre, une beauté sans pareil. Bon, revenons à notre discussion. 

- Accouche, je grogne, flemme d’attendre, tu craches le morceau et on en cause after, okay ?
- Ouaip, acquiesce Tom au bout du fil. Bah, elle est genre…
- Azy, balance, coco ! je piaille, c’est pas que j’aime les mauvaises nouvelles mais bon autant dire tout de suite et après discuter, non ?
Z’êtes pas d’accord avec moi ? Je vois d’ici votre petit sourire en coin, vous devez me prendre pour une folle tout droit sortie de l’asile, non ? Si je puis vous rassurer, imaginez-moi avec une voix haut perchée, c’est plus marrant, je ne suis ni folle à lier ni atrocement stupide. Juste une grande comique.
Contre toute attente, mon copain sort :
- Elle est couic… 

Je m’étrangle. Je tousse bruyamment ce qui a pour effet de faire apparaître Alicia avec une tête mais, my god !, les cheveux en bataille, les yeux vitreux et la marque de l’oreiller sur la joue gauche. J’avale ma salive de travers alors qu’elle me regarde, effarée. Je retousse, me ré-étrangle et finis courbée en deux sur mon tabouret, les deux mains appuyées sur mon ventre. Mon tel tombe par terre, et par chance, ne coupe pas l’appel. J’entends les allô répétés de Tom et émets un couinement. J’imagine un point d’interrogation se former au dessus de la tête de celui-ci. Alicia, quant à elle, me tapote gentiment le dos. 

Mais je suis en train d’agoniser, pauvre andouille ! Je continue de tousser et finis, enfin, par me calmer. Je relève la tête et vois une lueur amusée dans les yeux de ma best friend, meilleure amie pour les nuls en anglais. Mdr, comme moi, quoi. À prendre avec humour, hein ? 

Je la remercie alors qu’elle commence à rigoler. Pour se ficher de moi, c’est tellement mieux ! Je souris et finis par reprendre le téléphone :
- Elle est genre, vraiment, couic ? je demande en redevenant sérieuse.
- Non, non, pas du tout ! Simplement morte et après elle va revivre, c’est bien connu c’est une morte vivante ! se renfrogne-t-il. Pff, elle était si jeune, soupire Tom. Mon dieu, mais qu’a-t-elle fait pour mériter ça ?
- Peut-être qu’elle était malade ? je propose.
- Non, non, non.
- Intoxication ? je suggère, nerveuse.
- Toujours pas, répond mon copain.
- Alors, euh… volontaire…? je murmure, redoutant la réponse.
Un soupir et un râle de douleur se fait entendre :
- Dans le mille, valide-t-il, un homicide volontaire, qu’ont dit les flics. 

Je m’en taule de mon tabouret, tient ! Alors que je termine les fesses par terre, j’écarte le combinet, les mains tremblantes. Mon dieu, mais qui et pourquoi ? Alicia qui a tout suivi d’une oreille pendant qu’elle déjeunait me relève, blanche comme un cachet d’aspirine, d’après mes expressions. Je… je porte les mains à mon cou, choquée. Elle est aussi traumatisée que moi et je n’imagine même pas la réaction de Tom quand il a appris la nouvelle. Oh, mais… Pourquoi, mon dieu, pourquoi ? Et qui ? Bon dieu…! Pour la deuxième fois en cinq minutes, je reprends le portable qui clignote. 

- Oh, je suis tellement désolée, je chuchote, passe à l’appart’ pour causer, si tu veux. Si tu préfères rester un peu seul, je comprends, mais n’oublie pas mon chat que je suis là si tu en as besoin.
- Non, ça va aller, je vais sortir avec mes potos ce soir pour me vider la tête et pis, ben… Je vais m’en sortir, ça va aller, n’oublie pas que je suis là aussi, je t’aime.
- C’est réciproque, fais-je en lui conseillant de ne plus y penser.
- Encore merci, zibou ma chérie, me salue-t-il.
- Bisous… 

Je repose mon iphone sur la table de la cuisine et regarde l’heure. Huit heures cinquante-cinq. Je murmure des choses incompréhensibles et décide d’appeler les parents de la jeune fille tuée, Tamsin. 

Ils décrochent à la deuxième sonnerie. On cause pendant dix minutes. Ils m’indiquent où ils se trouvent, c’est-à-dire sur les lieux du crime. Elle aurait été tuée à coups de fourchette. Oui, oui, vous avez bien lu, à coups de fourchette ! D’abord, au niveau des côtes puis des bras et plusieurs griffures portées au cou jusqu’à toucher la jugulaire qui fut percée. L’assassin devait donc être plutôt musclé ou avoir de la force, les fics ont vu qu’elle s’était débattue avant de mourir. My god, it’s atrocious ! Ça fait cinq jours qu’elle est décédée mais Tom ne voulait pas me blesser en me le disant avant. 

Je décide de prendre mon manteau et d’enfiler mes converses, j’informe Alicia que je sors mais elle m’arrête. Je me retourne, une main trifouillant dans le sac, et plante mes yeux dans les siens. Elle s’approche et pose ses deux mains sur mon épaule. En un clin d’œil nous nous sommes comprises. Elle me souhaite bonne chance et me dit que je suis courageuse juste par le regard. C’est aussi ça, une meilleure amie, quelqu’un qui vous comprend et que vous comprenez en deux temps trois mouvements. 

Je détourne les yeux pour ne pas pleurer et quitte l’appartement, je prends la voiture qui est garée sur le parking. Je roule en direction d’un sous-bois guidée par le GPS, en ayant une boule dans la gorge. J’arrive sur les lieux et découvre les parents de Tamsin, habillés tout en noir. Mince, moi j’ai un pull rouge et un jean bleu. Bon, je m’approche d’eux et on se fait un gros câlin. Les larmes coulent, la colère éclate, les sanglots résonnent mais nous nous serrons dans les bras. Je secoue la tête. Je remarque deux gendarmes qui s’approchent et nous font un triste sourire, je relève les yeux et commence à poser des questions. 

Me trouvant sûrement trop rapide l’homme m’arrête d’un geste de la main. Je me présente rapidement et continue mes questions. Où ? Quand ? Qui ? Comment ? Pourquoi ?… La femme qui accompagne le flic tente de me répondre bien précisément mais je vois qu’elle bute sur le pourquoi et sur le qui. 

C’est un meurtre qui s’est déroulé ici, c’est une agression à la fourchette qui a eu lieu il y a cinq jours, c’est à dire lundi soir, le cinq septembre. On a retrouvé, mon dieu merci !, l’arme du crime et on a pu l’analyser mais on n’a pas encore identifié l’ADN. 

Les flics suspectent Tom, oui mon copain, pourquoi lui, ne me demandez pas, je n’en sais rien. Son mobile, ce serait qu’il n’aurait pas accepté le fait qu’elle sorte avec un mec de deux ans de plus qu’elle. Or, Tom n’est pas du tout comme ça, j’en reste comme cinquante cinq ronds de flan, selon mes expressions encore une fois ! Je ne dis rien à ce sujet mais me promets de creuser l’idée. 

Sinon, le deuxième suspect serait, cette fois, l’ex de Tamsin, un espèce de grand gaillard à l’allure de surfeur que Tam aurait plaqué il y a un an mais qui ne se serait pas remis de leurs séparation. On dit toujours que les surfeurs sont BG mais là y a que le corps de pas mal, hein. Mouais, je penche plus pour le grand gaillard à tête de fouine. Beurk, je ne sais pas ce que Tam’s aurait pu lui trouver mais bon, on dit toujours que l’amour rend aveugle. Dans ce cas, possible qu’elle soit sortie avec pendant deux ans avant de le plaquer car il commençait à être trop insistant : il ne lui laissait pas de liberté, elle souriait à Tom et c’était la débandade.  

Bon dieu ! Je ne supporterais pas que mon copain soit comme ça, et heureusement ce n’est pas le cas. Je demande à m’approcher des barrières encadrant le lieu du meurtre en disant que mon père est policier. Ce qui n’est évidement pas le cas. Pas grave, un petit mensonge pour une grande cause.
J’inspecte de l’œil la scène et remarque presque immédiatement un bout de tissu coincé sur un piquet. Je viens voir de plus près et décide d’interpeller la policière de tout à l’heure. Elle me contourne et saisit l’étoffe du bout d’une pince. Elle me remercie et décide d’aller en savoir plus à propos de ce truc-là. Je passe sous les barrières et rejoins la gendarme qui passe le textile dans une machine. Un vacarme assourdissant retentit mais personne ne bronche alors que moi je grimace.
- Ciel ! s’exclame-t-elle. 

Elle nous plante tous les trois, les parents de Tam et moi, nous laissant les bras ballants. La flic accourt vers ses collègues et crie des choses que nous ne comprenons pas. Je lève un sourcil en direction de Stéphanie et Sébastien. Ils me regardent, interloqués. Je hausse les épaules et décide d’aller voir ce qui se trafique là-bas. J’approche et demande des renseignements :
- Vous avez découvert quelque chose ? je questionne.
- Oui et non, m’informe-t-on.
- C’est-à-dire ?
- Ce tissu que vous avez trouvé appartient à la victime, on pense pouvoir éclaircir certains aspects de l’enquête.
- Bon, et du coup c’est tout ? je fais.
- Et c’est tout. On est sur les lieux du crime depuis lundi et ce détail nous avait échappé. Merci pour votre découverte jeune fille, m’indique un policier d’environ trente ans, quel est le nom de votre père ? Puisqu’il est du métier je dois sûrement le connaître…
- Oh, euh… Bah, il ne prend pas son vrai nom pour travailler donc je ne connais pas celui qu’il utilise dans sa profession.
Et un mensonge de plus, oupsi. Bah tant pis, au moins j’ai fait avancer l’enquête. Je salue de la main les deux S, autrement dit les parents de Tam et reprends la route jusqu’à mon appart’. 

Là-bas, j’explique tout à Alicia autour d’un cappuccino. Je décide de noter tout ce que je sais sur l’enquête dans un cahier avec ma cop’s derrière moi qui m’indique comment bien tout organiser et repasse en fluo les choses importantes. 

On y passe deux heures et c’est ma faim de loup qui nous ramène à la réalité. Je continue d’en discuter avec elle tout en préparant le repas de ce midi. On mange au contraire dans un silence de plomb. Une heure et demie après, je me penche encore sur mes notes. Je me creuse lat tête pendant l’après-midi et ce n’est que quand je vois le soleil décliner que je lève les yeux. Je vois Alicia repasser en chantonnant. On termine la soirée et je cours me coucher après avoir déposé un bisou sur sa joue et lui avoir souhaité bonne nuit. Je m’endors en quelques minutes. 

***

Le soleil filtre à travers les rideaux or pâle et j’entends d’une oreille les corbeaux, c’est tout de suite moins romantique, hein.
Je m’extirpe des draps, me prépare, déjeune et quitte l’appartement. Je me dirige vers la maison des parents à Tam et demande à voir sa chambre. 

Je grimpe au deuxième étage et entre dans un petit cocon chaleureux. J’inspecte la pièce avec des gants et déniche, telle une détective, un journal intime. Je lève un sourcil interrogateur. 
 Et c’est là, dans une chambre colorée de rose, vert et noir, qui ne m’appartient pas car elle est à une jeune fille décédée et dont les questions restent sans réponses, que je me jette à corps perdu dans l’enquête. C’est à moi et à moi seule de régler cette histoire, ne serait-ce que pour ses parents mais aussi pour Tom. Pour l’innocenter. J’ouvre, fébrile, le fameux journal et apprends de nombreuses choses sur Tamsin qui pouvait passer pour une femme à qui la vie avait souri dès la naissance. Je découvre que le nouveau mari de sa mère a la main leste et qu’il a une légère dépendance à l’alcool. J’ouvre de grands yeux. Tam’s avait tout pour elle, son père et sa belle-mère aimants, sa propre mère, riche et célèbre. De plus, la jeune fille possédait un charisme débordant et une popularité sans limite, un compte instagram débordant d’abonnés, enfin ça c’est pas important, une intelligence à couper le souffle et bien d’autre choses mais visiblement l’image qu’elle renvoyait cachait un sombre passé. Je m’assieds du bout des fesses sur son lit et pense à l’arme du crime. Une fourchette. 

Une lumière apparaît dans un coin de mon esprit. Je me rue hors de sa chambre, explique en deux trois mots ce que j’ai appris et ce à quoi je viens de penser et cours jusqu’à la police municipale.
Je pousse les personnes des coudes et me poste devant un gendarme qui me regarde, ahuri.
- Oh, ça va, hein ! je piaille, j’ai appris un truc sur l’affaire de Tamsin Chiro.
- Allez vous asseoir sur ses chaises, on viendra vous chercher, m’indique-t-il sans m’adresser un seul coup d’œil.
- J’espère bien ! je lance d’aplomb, j’vais pas clamser ici, une morte ça suffit, pas besoin d’une deuxième !
- Je vous prierais de respecter les personnes de cette pièce et de ne pas ébruiter l’affaire, cela ne les concerne pas, réplique-t-il sèchement.
- Gnagnagna, qu’il pense ce qu’il veut ce vieux rat ! je murmure en m’asseyant. 

On vient me voir quelques minutes plus tard, c’est une dame d’un certain âge mais plutôt jolie, et j’explique tout dans une pièce plus sombre que ma cave, bon dieu ! Ça leur arrive de faire le ménage ?! La femme rondouillarde en face de moi note au fur et à mesure, je crois qu’elle s’appelle Gabrouille, son nom de famille hein, tandis que son coéquipier me pose les questions. Un grand gaillard avec une tête d’ange, ma parole ! Je secoue la tête : il vient de me poser une énième question alors que je tâchais de ne pas m’endormir. Ah bah braavooo, Line ! C’est pas la peine de passer pour une andouillette de dernière catégorie ! L’entretien se termine et je rabâche encore et encore ce qu’il m’a dit. 

Je sors de la police municipale et me dirige vers Ice Cream’Angela, un restaurant faisant les meilleures glaces de la ville, si c’est pas du monde. Je déguste ma commande assise à une table de bois alors que Tom arrive après mon appel. Il m’embrasse et je lui rend la pareille. Je réexplique pour la centième fois (au moins!) ce que j’ai découvert : l’ancien crush et petit ami de Tam était connu dans le monde des artistes et notamment d’une actrice du nom de Louisa truc muche, qui était sortie avec notre gars pendant cinq ans. Il l’a plaqué pour Tam mais madame n’en est pas restée là. Elle a harcelé notre pauvre Tamsin pour qu’elle quitte la tête de fouine. La tête de fouine, c’est son ex, hein. Celui qui a que le corps de surfeur mais qui a une face immonde, là. Elle aurait résisté aux assauts de l’autre folle mais aurait fini par le plaquer l’an dernier pour cause de non liberté. Je proclame la totale liberté des femmes, féminisme pauvre andouille ! Dédié à Tête De Fouine ou Truffe selon vos goûts. Bref, Louisa aurait le parfait mobile pour tuer Tamsin car lorsque Tête De Fouine l’aurait plaquée pour Tam elle l’aimait encore donc voilà : se débarrasser de Tam’s, cette donzelle enquiquinante selon elle pour pouvoir récup’ Corps de Surfeur mais Tête De Truffe… La génie, cette Louisa, enfin non. Faut laisser Tam en vie quand même… C’est un bon plan mais avec une fin tragique. 

Tom me regarde, choqué, épouvanté et tremblant comme une feuille. Je contourne la table et m’assois à ses côtés. Je fais claquer mon index et mon pouce devant ses yeux mais il ne réagit pas. Je réussis finalement à le sortir de sa demi-inconscience et on repart chez moi pour discuter et éclaircir les ombres de l’enquête. On parle et débat sur le chemin mais aucune conclusion concrète ne nous vint à l’esprit. Malgré ma déduction de tout à l’heure qui nous paraît plausible nous n’avons rien à nous mettre sous la dent. 

On passe une heure autour d’un café tout les deux et Alicia nous rejoint à la fin pour exposer ses idées. Je termine par proposer à Tom de rester à l’appart’ pour manger et passer la nuit. Il me répond que ça lui ferait énormément plaisir de pouvoir passer du temps en ma companie. Je prépare le repas et la discussion est animée durant le dîner, on part se coucher, Alicia dans la chambre de droite et mon copain et moi dans celle de gauche. Je m’endors au bout de quelques minutes et me rappelle que demain je dois travailler chez Ice Cream’Angela en tant que serveuse. Mon petit-ami me prend dans ses bras avant de sombrer dans les bras de Morphée à son tour. 

~ ~ Je ne discerne plus rien à part une nappe de brouillard. J’avance à tâtons dans la brume et me cogne violemment contre un objet dur. Je réprime un couinement et aperçoit une ombre furtive. Je plisse les yeux mais ignore où elle est partie. J’avance aussi silencieusement que possible et découvre une porte devant moi. Je tente de l’ouvrir et elle cède du premier coup alors que je glisse à l’intérieur d’un bâtiment que je viens d’identifier comme une église catholique. Je me retrouve nez à nez avec un cercueil. Je réalise peu à peu que j’assiste à des funérailles. Je connais la personne décédée et m’assois au premier rang à côté d’un couple d’une quarantaine d’années en larmes. Le prêtre récite son discours mais je n’y comprends pas grand-chose étant donné que je n’appartiens à aucune religion. Il annonce d’une voix solennelle et désolée le nom d’une personne que je mets du temps à reconnaître. Soudain, prise de nausées, je me lève et m’excuse au près du couple qui hoche la tête. Je me rue aux toilettes et vomis le contenu de mon déjeuner. Il est à présent là-bas, loin de moi et d’ elle. ~ ~ 
 
J’ouvre les paupières en sursaut et ruisselante de sueur. Tom se cogne violemment la tête contre le mur car je l’ai réveillé également, il plaque une main sur ma bouche.
-… Est… que… tu fais ? j’arrive à articuler.
- Tu hurles comme une alarme d’incendie, me répond-il.
-… Relâche… oi ! je piaille.
Il enlève sa main de ma bouche et je me masse la mâchoire.
- Tu m’as fait mal… je me plains.
- Nan, en vrai je t’ai pas blessée du tout, se renfrogne-t-il.
- Mais je sais, j’te taquine, j’essaye de détendre l’atmosphère mais ce nom résonne en continu dans mon crâne. 

J’essuie mon front ruisselant et Tom me cale contre lui. Je colle mon dos à son ventre et place mes jambes entre les siennes. Il me caresse les joues qui, à présent, sont inondées de larmes. Je sanglote, et pose ma tête sur mes genoux ramenés contre ma poitrine. Mon copain s’appuie au niveau du mur et relève mon visage où il dépose un long et doux baiser sur mes lèvres humides. J’enlace mes bras autours de son cou et pose ma tête contre son torse et il resserre ses mains autour de ma taille. J’entrouvre la bouche et il pose la sienne sur la mienne. Je finis par me reculer. 

- Alors, t’as fait un cauchemar mon cœur ? me demande-t-il.
- Non… Non. Une (mon dieu !) une espèce de vision qui a tourné au drame…
- Tu veux me raconter ?
Il se montre bien veillant et compréhensif mais il ne mesure pas l’intensité de ce que j’ai vécu.
- Je… Il est quelle heure ? je le questionne.
Il regarde sa montre et m’indique qu’il est six heures trente-cinq.
- Il faut qu’on aille chez les flics ! je crie.
- Wow, wow, wow ! Calme, explique-moi un peu tout ça et on en reparle après, ensuite on ira au commissariat. 

Je débite à toute allure ce que j’ai vu mais il insiste en me posant des questions. Mes yeux s’humidifient et je chasse d’un geste nerveux les larmes qui montent. Tom m’enlace et je me rendors contre toute attente. Une mèche de cheveux qui vient chatouiller mon nez me réveille. Il n’a pas dormi depuis tout à l’heure. Je jette un œil à sa montre, huit heures.
On se lève et se prépare et il confectionne le petit déjeuner. On mange et quitte l’appartement quarante-cinq minutes après. Il conduit sa Clio et débouche sur le parking du commissariat. 

Je toque à la porte et la pousse, je m’appuie contre elle et force pour l’ouvrir mais toujours rien. Je souffle, croise les bras et tape du pied par terre. Je vois Tom se marrer et tirer la porte vers lui, par miracle, non je suis juste nunuche, elle s’entrouvre et on rentre à l’intérieur pour échapper au froid de dehors. Je m’assieds sur un canapé et mon copain se glisse un chewing-gum dans la bouche. Un policier vient nous voir et on rentre dans un bureau impeccablement rangé. Ce qui change, évidemment, de l’autre pièce poussiéreuse et en bazar complet. Je pose gentiment mes petites fefesses sur l’une des trois chaises réservées à la clientèle. J’explique ma vision de cette nuit. Le flic me regarde d’un œil bizarre et croise ses mains en s’humectant les lèvres.
- Hum, hum… fait-il.
- Oui ?
À mon grand étonnement et suscitant une colère grandissante, ce type explose de rire. Mais vraiment. Il ricane en se frappant les genoux et essuie ses yeux qui pleurent. De rire. Je pousse un sifflement strident.
- Stop ! Non, mais qu’est ce qui vous arrive ? je hurle.
- Ah ! Elle est bonne celle-là !
L’andouille rigole toujours alors que je m’acharne à rester calme malgré tout.
- Je vous parle de choses sérieuses et vous, tout ce que vous trouvez à faire, c’est éclater de rire ! Mais vous êtes attardé mentalement mon pauvre gars ! 

Après cette tirade je me lève d’un bond et quitte furieusement la pièce d’un pas décidé et colérique. L’homme se calme immédiatement et me rattrape par le bras. Je crie et me dégage avant de m’arrêter devant le bureau d’accueil. Ce n’est plus le gros pif d’hier qui la tient mais une petite bonne femme tirée à quatre épingles. C’est quoi ce commissariat ? Entre un attardé qui rigole tout le temps même pour des choses sérieuses, une vieille refaite de toute part, je nomme madame tirée à quatre épingles, un plutôt mignon et Gri… Non Gabrouille, on est bien les gars, on est bien ! Je demande à voir celui qui m’a écouté hier, le flic pas mal, là… Elle part le chercher et il m’accompagne dans son bureau où j’explique, encore une fois, ma vision et ce qui s’est passé avec l’autre. 

On parle et il me propose d’aller la voir. La police criminelle a déjà rendu visite à Monsieur tête de fouine et il a un alibi pour le soir du crime. Flûte !
Je rentre chez moi à pied après avoir dit à Tom que j’avais besoin d’être seule. Je rumine ma matinée sous ma douche. 

Mon iphone vibre mais je l’ignore royalement. Je me sèche, enroule mes cheveux dans une serviette orange fluo, on me voit de loin au moins, et écoute le message vocal laissé. C’est les flics, à qui j’ai donné mon numéro à l’accueil au cas où ils auraient besoin de m’appeler, qui ont téléphoné. Je suis conviée à l’enterrement de Tamsin mercredi prochain, dans… quatre jours ! Je dois y assister et je VEUX y assister pour Tam mais ce ne sera pas la joie… Sinon, on me dit que Tête de truffe est toujours innocent après une vérification de son alibi auprès de ses proches avec qui il a passé son lundi soir au restaurant jusqu’à minuit. Restaurant se situant au bout de ma rue dont le serveur a regardé sa liste de clients de ce jour-là et Tête de fouine y était bien. Donc, c’est forcément Louisa machin chose qui est l’ex de Tête de fouine qui a tué ma Tam. Les flics n’écartent pas cette possibilité et vont enquêter de ce côté. Conclusion, ce n’est pas Tom qui a assassiné Tam’s. J’avais raison depuis le début. Pff, Tom tuer Tam, non mais où va le monde ! 

Je l’appelle pour lui annoncer et il me dit qu’il est arrivé chez lui. Je prends mon manteau et pars chez Ice Cream’Angela pour prendre mon service après Marina, l’autre serveuse. J’arrive là-bas et commence à servir les clients : une troupe de garçons/filles qui commande des glaces et des boissons et un couple d’un certain âge ayant une passion pour la glace aux fruits de la passion. Ha, ha, ha ! Oh rigolez un peu quoi ! Moi je suis morte de rire derrière le comptoir. Enfin, moi c’est à cause d’un jeune homme qui vient de se prendre les pieds dans le tapis et s’est étalé de tout son long par terre. Marina le redresse mais il est, heureusement, en train de rigoler. Je rentre chez moi vers dix-sept heures et mange un morceau. 

Je mets un film en route et, quelle stupide andouille, m’endors devant. Mon téléphone qui sonne me tire de mon sommeil. Les yeux gonflés je décroche sans même reconnaître le numéro. Il n’est pas dans mon répertoire.
- Allô ?
- Madame Dausse ?
- C’est moi-même.
- Bonjour, madame. Je suis désolé de vous annoncer cela mais vous êtes convié le plus rapidement possible au poste de police de la ville voisine.
- Ah. Bon très bien, j’y serai. Merci monsieur.
- À toute suite madame.
- C’est cela. 

Je raccroche et file me préparer. Je quitte mon appartement et emmène Alicia avec moi. On arrive une demi-heure plus tard et je ne comprends toujours pas ce que qui m’attend. On se réchauffe vite à l’intérieur et un agent nous prend en urgence. C’est celui qui était sur les lieux de l’enquête l’autre jour ! Il me fait un clin d’œil et mon amie m’indique qu’il me dragouille un peu. On rentre dans une pièce. 

On me place et on fait entrer le potentiel coupable du meurtre de Tamsin Chiro. Je m’attends à voir apparaître notre très cher Tête de Fouine mais je m’effondre lorsque j’aperçois une personne que je connais bien avec une tête brune, le teint hâlé et les yeux verts, la musculature développée. Des larmes de rage roulent sur mes joues et je me prends la tête dans les mains lorsque je comprends qu’il m’avait trompée, et que jamais je ne m’en remettrai… Alicia me réconforte mais je suis blessée, il m’a détruite. Je me lève, me dirige vers lui et lui administre une gifle monumentale, ainsi la marque de mes cinq doigts est tracée sur sa joue rugueuse et est encrée dans ma mémoire et dans la sienne pour le restant de ses jours. Il ne relève pas et me regarde, les yeux aussi froids que de la glace. Je lui tourne le dos et me rassois le plus loin possible de lui. 

Je vois pourtant son regard qui scintille et une larme perle au coin de ceux-ci. 

On apprend le mobile du meurtre : notre coupable n’a jamais encaissé le fait que Tamsin soit sortie il y a des années de cela avec un jeune homme de quatre ans de plus qu’elle alors que lui-même éprouvait des sentiments pour son amie d’enfance. J’ouvre de grands yeux choqués. Toute cette histoire l’a rongé jusqu’à ce qu’il en perde la raison et porte le coup fatal après une soirée entre amis et quelques verres de trop. Mon ex-petit copain a tué sa meilleure amie. Il s’agit évidemment de Tom que je viens officiellement de quitter après une jolie et agréable baffe que je savoure avec un réel plaisir. Cette affaire est close et il finira derrière les barreaux. Il tente de s’approcher de moi et pose une main sur ma joue. Je n’ai aucune réaction. Alicia se place à ma gauche et le fusille du regard alors qu’il plonge le sien dans mes yeux emplis de larmes. Je comprends, c’était lui qui était apparu dans ma vision. 

- Tu as osé… je gronde dans un murmure.
- Tout est allé trop vite pour que j’aie le temps de réagir, explique-t-il sur le même ton.
- Non, c’est faux et tu le sais aussi bien que moi.
- J’ai voulu…commence-t-il.
Je chasse de la main ses propos inutiles.
- C’est fait. C’est trop tard, elle ne reviendra pas.
- J’ai joué avec elle pendant toutes ces années, révèle-t-il. Je ne m’en remettrai pas et je m’en voudrai toute ma vie. J’ai été un …
Je ne citerai pas la vulgarité.
- Tu as été mon second cobaye, tranche-t-il impénétrable.
Et, je m’effondre, anéantie. 

Océane Marie

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